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Endoscopie

Coloscopies de surveillance induites par le programme de dépistage organisé du cancer colorectal par Hemoccult : une étude de cohorte en population

2014

B Denis, I Gendre, P Perrin, pour les gastroentérologues du Haut-Rhin et ADECA Alsace

Endoscopie –  2014-04-21 – CO –

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Il a été démontré dans plusieurs pays que la surveillance par coloscopie est souvent excessive chez les personnes à faible risque et insuffisante chez celles à haut risque. Elle n’a jamais été évaluée en France ni dans le cadre d’un programme de dépistage organisé du cancer colorectal (DO CCR).
Buts : évaluer les pratiques de surveillance coloscopique dans le programme Français de DO CCR par Hemoccult.
Méthodes : Etude rétrospective des coloscopies de surveillance (C2) réalisées dans une cohorte de personnes à risque moyen explorées par coloscopie pour Hemoccult positif (C1) entre 2003 et 2005 dans le Haut-Rhin, département pilote : toutes les C1 avec polype(s) ou cancer (C1aN) étaient inclues ainsi qu’un échantillon de 300 C1 normales (C1N). Seules les coloscopies étaient comptabilisées, à l’exclusion des recto-sigmoïdoscopies. Trois sources d’information étaient sollicitées : les patients et les gastroentérologues (GE) systématiquement et les médecins généralistes ponctuellement. La conformité des C2 était évaluée avec une marge de 6 mois par rapport au délai recommandé (HAS 2004).
Résultats : 343 (22%) personnes étaient exclues de l’analyse, dont 95 dont la C2 avait un motif autre que surveillance, 81 décédées, 40 (2.6%) perdues de vue, 95 dont le résultat de la C1 ne permettait pas d’établir une date de surveillance recommandée incontestable et 24 à haut risque. 1203 personnes étaient évaluées (âge moyen 63 ans, 59% d’hommes, 991 avec C1aN et 212 avec C1N) avec un suivi médian de 8.4 ans (1.1 – 9.8). Les coloscopies étaient réalisées par 34 GE, les C2 par le même opérateur qu’en C1 dans 80% des cas. Le taux de C2 conformes variait de 20 à 63% selon le GE, celui de C2 prématurées de 0 à 47% et celui de C2 trop tardives de 11 à 80%. La probabilité cumulée d’avoir eu une C2 à 5 ans était de 88% dans le groupe cancer, 63% dans le groupe adénome à haut risque, 29% dans celui à faible risque et 5% dans celui sans néoplasie (respectivement 63%, 29%, 7% et 1% à 3 ans). La probabilité de ne pas avoir eu de C2 à 8 ans était respectivement de 7%, 23%, 43% et 87% dans les mêmes groupes. 25% des personnes avec lésion néoplasique à la C1 avaient échappé à toute surveillance. Ce taux était significativement supérieur chez les 65-74 ans (31%) que chez les 50-64 ans (20%)(p<0.001), sans différence liée au sexe. Seuls 25 (5%) défauts de surveillance étaient justifiés par une comorbidité intercurrente. Le taux de C2 prématurées était de 25% dans le groupe des 126 C1 avec réserve sur la qualité de la préparation, non significativement différent de celui de 20% du groupe des 1077 sans réserve exprimée (p=0.2).
Conclusions : Une coloscopie anormale sur 4 bénéficie d’une surveillance conforme aux recommandations en vigueur, une sur 4 d’une surveillance excessive, une sur 4 d’une surveillance insuffisante et une sur 4 échappe à toute surveillance. Une coloscopie normale sur 7 bénéficie d’une surveillance excessive. Ce mésusage des coloscopies de surveillance devrait être comptabilisé dans les effets indésirables du programme de DO CCR. Les structures de gestion pourraient contribuer à améliorer le suivi par coloscopie des personnes dépistées dans le programme national de DO CCR.