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Hepatologie

Qui sont nos cirrhoses? Quand et comment meurent-elles?

2013

Jean Henrion, Stéphane De Maeght, Marie De Vos, Pierre Deltenre.

Hépatologie –  2013-04-07 – CO –

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But : Etude comparative de l’épidémiologie générale et des circonstances de décès entre cirrhose alcoolique, cirrhose due au virus de l’hépatite C et cirrhose d’une autre étiologie dans une cohorte prospective colligée de janvier 1995 à décembre 2012.

Méthodes : De janvier 1995 à décembre 2012, toutes les cirrhoses vues par l’un d’entre nous (JH) en consultation ont été incluses dans un registre prospectif. Le diagnostic de cirrhose reposait soit sur la biopsie hépatique, soit sur l’évidence clinique. Les malades ont été classés suivant trois étiologies (alcool, VHC, autre étiologie). Ils sortaient du registre et du suivi régulier (tous les six mois) en cas de décès, de carcinome hépatocellulaire, de transplantation ou de régression de la fibrose. Pour les malades perdus de vue, des recherches intensives ont été faites à partir du DPI (dossier patient informatisé) et par contacts téléphoniques avec les médecins généralistes ou éventuellement, avec le patient et sa famille.
Deux cohortes ont été prises en compte: Pour l’étude de l’épidémiologie générale, la cohorte totale incluant l’ensemble des malades de 1995 à 2012; pour les circonstances de décès, une cohorte 95-07 comportant uniquement les malades inclus de 1995 à 2007, cela afin d’avoir un recul minimum de cinq ans. Pour cette dernière cohorte, la recherche des données manquantes a été faite en fin d’année 2012.

Résultats : 1/ Données épidémiologiques générales: 741 cirrhoses (cohorte totale) ont été colligées de 1995 à 2012. La cirrhose était d’origine alcoolique dans 444 cas (60%), due au VHC dans 166 cas (22.5%) et d’une autre étiologie dans 131 cas (17.5%). 78 des 741 malades (10.5%) avaient plusieurs facteurs de risques et le plus évident a été choisi comme étiologie principale. Une biopsie hépatique fut réalisée chez 455 malades (61%), mais fut moins souvent réalisé récemment. Ainsi, pour les malades inclus de 1995 à 2007 (N=591) une biopsie fut faite dans 70% des cas alors que pour les malades inclus de 2008 à 2012 (N=150), elle fut réalisée dans 28% des cas. Dans cette cohorte de 741 cirrhoses, 63% étaient des hommes (alcool 68%, VHC 56%, autre étiologie 55 %). L’âge moyen au moment du diagnostic de cirrhose était de 56.3 ± 12.1 ans (alcool 53.2, VHC 63.2, autre étiologie 57.7). Au moment de l’inclusion dans le registre, 34% des malades étaient en stade B ou C de la classification de Child Pugh (alcool 46.4%, VHC 16%, autre étiologie 17.5%).
2/ Circonstances de décès: De la cohorte 95-07 (591 cirrhoses), 63 malades ont été exclus, 14 car totalement perdus de vue et 49 vu l’existence d’un hépato-carcinome présent dès l’inclusion. Les circonstances de décès ont donc été étudiées chez 528 cirrhoses avec un recul de 5 à 18 ans. De ces 528 cirrhoses, 317 (60%) étaient d’origine alcoolique, 118 (22%) dues au VHC et 93 (18%) dues à une autre étiologie. En fin 2012, 343 de ces 528 malades étaient décédés (65%), dont 222 cirrhoses alcooliques (70%), 72 cirrhoses dues au VHC (61%) et 49 cirrhoses d’une autre étiologie (53%). L’âge moyen au moment du décès était de 60 ± 10.8 ans en cas de cirrhose alcoolique, 74 ± 8.6 ans en cas de cirrhose due au VHC et 72 ± 13.2 ans en cas d’autres étiologies. La durée de survie à partir du diagnostic de cirrhose fut en moyenne de 69.5 mois en cas de cirrhose alcoolique, de 93 mois en cas de cirrhose VHC et de 93 mois en cas de cirrhose d’une autre étiologie. 162 des 222 malades alcooliques sont décédés de causes hépatiques (73%), le plus souvent de cirrhose au stade terminal, alors qu’un décès hépatique fut observé chez seulement 38/72 cirrhoses VHC (53%) et chez 33/49 (67%) cirrhoses d’une autre étiologie (67%).

Conclusions :
1. Cirrhose alcoolique et cirrhose VHC ou d’une autre étiologie sont des maladies différentes (Rapport des genres, âge au diagnostic, sévérité, espérance de survie, circonstances de décès). L’amalgame doit être évité.
2. Le dépistage du CHC chez les malades alcooliques n’est pas la priorité et peut même être remis en cause. Il ne devrait être réalisé que chez les malades abstinents.
3. Les cirrhoses VHC sont des malades âgés qui décèdent une fois sur deux de causes non hépatiques
4. La biopsie hépatique n’est plus très en vogue.

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Hepatologie

Complications cutanées néoplasiques du sorafénib: discussion autour d’un cas de carcinome spinocellulaire chez un patient traité pour carcinome hépato-cellulaire

2012

DUPUY Marie, URSIC-BEDOYA José, KHEMISSA Faiza, AMOUROUX Caroline, REMY André-Jean

Hépatologie –  2012-05-04 – CO –

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Observation: un patient agé de 70 ans était suivi dans notre service pour une hepatite chronique B au stade de cirrhose traitée par lamivudine puis, du fait d’un échappement, par entécavir avec une négativation de la charge virale soutenue. En mai 2011, le bilan montrait une cirrhose child A6, une AFP normale, à la TDM il existait une plage nodulaire hypodense d’environ 20 mm plus marquée au temps portal. Une IRM était rapidement réalisée et montrait un nodule en hypersignal spontané du secteur IV avec hypervascularisation au temps précoce et aspect en cocarde en temps tardif. Il existait de multiples images nodulaires de petites taille hypervascularisées au temps artériel et infra-centimétriques.
Le diagnostic de carcinome hepatocellulaire était porté selon les critères de Barcelone. Après RCP, les traitements par chirurgie, transplantation ou chimioembolisation ont été recusés et il a été decidé d’un traitement par sorafenib. Le patient était donc inclus dans un essai thérapeutique (prodige 11) . Il a été randomisé dans le bras sorafenib associé à la pravastatine. Le traitement était débuté en mai 2011. La tolérance clinique était satisfaisante avec une asthénie grade 2. Deux mois après l’initiation du traitement une nodule cutané apparaissait au dessus de la lèvre et augmentait de taille progressivement. Devant cet aspect suspect une ablation étaitt programmée et l’histologie définitive concluait à un cacinome epidermoide différencié keratinisant infiltrant. Le traitement par sorafenib a été interrompu. Lepatient est toujours vivant en mai 2012, sans récidive.

Discussion : Nous rapportons un cas de carcinome spinocellulaire cutané apparu 3 mois après l’instauration d’un traitement par Sorafenib. Le sorafenib est un traitement anti-angiogénique utilisé pour les carcinomes rénaux et hépatiques. Ses effets indésirables cutanés à court terme sont bien connus. À plus long terme, la survenue de kératoacanthomes a récemment été rapportée(1) et plus rarement, celle de carcinomes spinocellulaires infiltrants (2,3)
Les délais rapportés de survenue sont de 1 à 9 mois et la physiopathologie n’est pas complètement élucidée. Le sorafenib agit directement sur les fonctions des cellules dendritiques en réduisant la sécrétion de cytokines. L’inhibition du vascular endothelial growth factor (VEGF) peut également entraîner des modifications du phénotype des cellules tumorales, avec un accroissement des mutations Ras oncogéniques jouant un rôle important dans la voie de signalisation Ras/Raf/Mek et MAP kinases impliquée dans la carcinogenèse cutanée.
Notre patient n’avait pas de facteurs de risque tels que l’exposition au soleil et aucun signe de infection par le papilloma virus n’avait été retrouvé sur l’histologie.

Conclusion : Notre cas clinique vient étayer les cas de la littérature rapportant une relation étroite entre la prise de Sorafenib et la survenu d’un carcinome spinocellulaire. Le mécanisme d’action reste inconnu et demande des études prospectives plus larges. Une surveillance cutanée régulière par un dermatologue doit être préconisée à tous les patients sous sorafenib

(1) Dermatologic symptoms associated with the multikinase inhibitor sorafenib.
Robert C, Mateus C, Spatz A, Wechsler J, Escudier B. J Am Acad Dermatol. 2009 Aug;61(2):360-1
(2) Cutaneous squamous cell carcinoma and inflammation of actinic keratoses associated with sorafenib.
Dubauskas Z, Kunishige J, Prieto VG, Jonasch E, Hwu P, Tannir NM.
Clin Genitourin Cancer. 2009 Jan;7(1):20-3
(3) Keratoacanthomas and squamous cell carcinomas in patients receiving sorafenib.
Arnault JP, Wechsler J, Escudier B, Spatz A, Tomasic G, Sibaud V, Aractingi S, Grange JD, Poirier-Colame V, Malka D, Soria JC, Mateus C, Robert C. J Clin Oncol. 2009 Aug 10;27(23):e59-61. Epub 2009 Jul 13

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Hepatologie

Résultats d’une étude prospective observationnelle devant la découverte d’une faible perturbation des transaminases en médecine générale

2012

F. Heluwaert (1), C. Reynier (1), L. Lecoq (2), J. Pofelski (1), P. Oltean (1), M. Baconnier (1), P. Capony (1), V. Leroy (2). (1) Annecy, (2) Grenoble.

Hépatologie –  2012-05-05 – Cho –

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Introduction
Une faible perturbation des transaminases (ALAT25kg/m². Consommation moyenne d’alcool : Homme = 13 verres/sem, Femme = 2
verres/sem. Nombre médicament/patient : 2,6+/-2,7 [0-15], taux ALAT moyen = 1,84N,
ASAT = 1,5N, GGT = 3,74N, PAL = 0,76N, TP moyen 95% ( 45% dans 7 cas avec 1 homozygotie C282Y et une hétérozygotie C282Y. Réalisation
d’une échographie dans 83,8% des cas et pathologique dans 61,3% des cas (stéatose 50%,
hépatomégalie 19,4%, Splénomégalie 8,1%) .
Les étiologies retrouvées sont stéatopathie dysmétabolique (75,6%) (Seul diagnostic dans
40,5%), médicamenteux 28,3% (Seul dans 5,4%) (traitement incriminés par fréquence
décroissante : statines, AINS ou antalgiques, oestroprogestatifs, allopurinol), éthylique :
21,6% (seul dans 4%), virus B ou C (2,7%), autres virus (EBV et 1 CMV) (2,7%),
hémochromatose génétique type1 (1,35%), sarcoidose (1,35%), pas de diagnostic (5,4%)
Un avis spécialisé était demandé pour 22 patients (30,6% des cas) et seulement 25% des
dysmétaboliques. Le recours au spécialiste était motivé par la découverte d’une étiologie B,
C, d’une hémochromatose, d’une splénomégalie, d’un TP<80% et d'une thrombopénie. Pour
les patients dysmétaboliques, ni le taux d'ASAT, d'ALAT, le rapport ASAT/ALAT, le TP ou les
données échographiques n'étaient associés au recours à un spécialiste.
un diagnostic de cirrhose a été porté dans 3 cas (alcool+dysmétabolique, alcool+virusB,
dysmétabolique seul), suspecté dans un cas (dysmétabolique+alcool), ainsi qu'une fibrose F3
(hémochromatose) et F2 (virus C).
Conclusion
La découverte par le médecin généraliste d'une faible perturbation du bilan hépatique
nécessite toujours une exploration minimale. La stéatopathie dysmétabolique représente la
principale étiologie, bien avant les causes virales.
Une évaluation de la fibrose hépatique devrait être systématiquement envisagée au vu du
nombre de fibrose sévère ou de cirrhose dépistée. Le recours au spécialiste est souvent
tardif. Des recommandations pratiques sur cette situation courante de médecine générale
mériteraient d'être énoncées par nos sociétés savantes.

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Hepatologie

Une élévation inhabituelle d’alpha foetoprotéine.

2012

Séverine HOMMEL, Magali PICON, Serge ERLINGER, Didier MATHIEU, François CESSOT (Aix en Provence)

Hépatologie –  2012-05-05 – CO –

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Nous rapportons le cas d’une femme âgée de 32 ans adressée pour élévation isolée de l’alpha foetoprotéine (AFP).
Ce dosage a été demandé par son médecin traitant devant des douleurs abdominales évoluant depuis 1 an associées à des ballonnements et à une constipation récente, sans notion d’altération de l’état général.Ses antécédents sont marqués par une péricardite virale quelques années auparavant, par un tabagisme actif à 5PA et par 2 grossesses par voie basse.
Le bilan prescrit par le médecin traitant ne retrouve aucun syndrome inflammatoire, le bilan hépatique est normal mais seul revient élevé le dosage d’AFP à 51.3 ng.ml(N<10). L'échodoppler abdominal est normal. L'examen clinique est sans particularité.
Il n'existe aucune prise de toxique, pas de consommation d'alcool et aucune prise médicamenteuse.
Le bilan biologique de controle confirme l'élévation de l'alpha foetoprotéine à 45.9 ng/ml, les autres marqueurs tumoraux étant négatifs, les sérologies virales (VHA, VHE, VHB, VHC) reviennent négatives de même que le dosage des BétaHCG.
Le scanner thoracoabdominopelvien injecté n'objective aucune anomalie. Les explorations endoscopiques (FOGD et coloscopie totale) s'avèrent normales.
Le diagnostic évoqué devant ces résultats est celui d'élévation héréditaire de l'alpha foetoprotéine. Un dosage familial de l'AFP est réalisé, revenant à un taux normal chez la soeur et la mère de la patiente mais élevé chez son père (AFP à 36.3 ng/ml). Un dosage est effectué par la suite chez l'oncle paternel et la tante paternelle, normal mais impossible chez les grands parents, ceux-ci étant décédés.
Ce syndrome décrit pour la première fois en 1983, dont le trait de transmission est autosomique dominant est rare. Seuls 5 cas ont été rapportés dans la littérature.
Il faut savoir évoquer ce diagnostic devant toute élévation isolée de l'alpha foetoprotéine après un bilan étiologique exhaustif (pour éliminer notamment les diagnostics différentiels carcinologiques), le diagnostic étant confirmé de manière simple par le dosage familial de l'AFP.
Ce cas soulève bien évidemment la question de la pertinence du dosage de l'AFP devant un syndrome abdominal douloureux chronique!

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Hepatologie

Une cholestase inexpliquée.

2012

Séverine HOMMEL, Magali PICON, Serge ERLINGER, Didier MATHIEU et François CESSOT (Aix en provence)

Hépatologie –  2012-05-05 – CO –

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Nous rapportons le cas d’un patient agé de 55 ans adressé pour bilan de cholestase ictérique avec suspicion de néoplasie de la tête du pancréas.
Les symptômes apparus 3 semaines plus tôt consistent en un ictère associé à une altération de l’état général (perte de 5 kg, anorexie, asthénie).
Le bilan biologique demandé par le médecin traitant révèle une pancytopénie (plaquettes à 96G/l, Hb à 7.9 g/dl, PNN à 2.2 G/l), une insuffisance rénale aigue avec créatininémie à 268 µmol/l et une cholestase sans élévation des transaminases et avec TP normal(PAL à 825 UI/l, GGT à 615 UI/l, Bili T à 40 µmol/l). L’échographie abdominale est sans particularité mais le scanner abdominal retrouve une hypodensité de la tête du pancréas motivant la poursuite des explorations.
Ses antécédents sont marqués par un alcoolisme chronique à 120g/j sevré depuis 1 an, une artériopathie oblitérante des MI (stents iliaques)et par un flutter récent réduit par choc électrique externe. Son traitement comporte: TAHOR- HEMIGOXINE et BISOPROLOL.
L’examen clinique met en évidence une hépatomégalie, un ictète et des oedèmes des MI.
Le bilan est complété par des sérologies virales (VHB, VHC) négatives et par un bilan martial normal. Le scanner abdominopelvien injecté puis la pancréatowirsungoIRM ne révèlent anomalie pancréatique mais la présence d’adénopathies centimétriques périhépatiques ainsi que d’une hépatomégalie homogène. L’échoendoscopie biliopancréatique est normale. Le diagnostic de néoplasie pancréatique est donc écarté.
Devant la pancytopénie et la cholestase est évoqué le diagnostic d’hémopathie infirmé par une immunoélectrophorèse sérique et urinaire normale, par des radiographies oseuses du corps entier normales puis par un myélogramme normal. Des BK tubages sont effectués, éliminant le diagnotic de tuberculose.
Devant la forte suspicion de cirrhose avec des résultats de Fibroscan en faveur (14 KPa)et malgré une FOGD normale et un bilan étiologique exhaustif négatif (Alpha 1 AT, céruléoplasmine, cuprurie et Ac anti tissus), une PBH transpariétale est effectuée retrouvant un aspect d’hépatite granulomateuse sans nécrose caséeuse avec ébauches de nodules. Le bilan est étayé par un dosage d’angiotensine convertase revenant élevé à 147 UI/l, par un scanner thoracique et des EFR s’avérant normaux. La bronchoscopie avec LBA ne montre qu’une hyperlymphocytose. L’examen ophtalmologique et l’échographie cardiaque sont sans particularité. La biospie ostéomédullaire objective des granulomes.
Le diagnostic retenu est donc celui de sarcoidose avec atteinte médullaire, hépatique (précirrhogène ou cirrhogène), rénale (néphrite interstitielle)et possiblement cardiaque.
Une corticothérapie à 0.5 mg/kg est instaurée rapidement permettant en 2 mois une nette régression de la cholestase, une quasi correction de la fonction rénale et de la pancytopénie. Une décroissance de la corticothérapie est actuellement en cours.
Le diagnotic de sarcoidose d’évolution cirrhogène est rare, il faut savoir cependant l’évoquer devant des formes cholestatiques inexpliquées.

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Hepatologie

UNE HEPATITE AIGUE A FOIE NORMAL…

2012

Clémence Hollande, Isabelle Rosa, Camille Barrault, Sandrine Barge, Laurent Costes, Thierry Lons, Hervé Hagège ; Service d’hépato-gastroentérologie, Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil

Hépatologie –  2012-05-07 – CO –

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Une jeune femme de 18 ans consulte pour cytolyse hépatique à 7N découverte au cours d’un bilan d’exploration d’arthralgies. Les ASAT sont à 214 (N<30), les ALAT à 185 (N<35), la phosphatase alcaline est normale et la Gamma GT est à 2N, la bilirubine est normale. L’albuminémie est à 40 g/l, les plaquettes à 271 000 et le TP à 73 % avec un facteur V à 87 %.
L’échographie hépatique montre une discrète hépatomégalie homogène sans nodule ni signe d’hypertension portale. Une étiologie virale est éliminée avec sérologies de l’hépatite A, B, C, E négatives. Les sérologies CMV et EBV sont en faveur d’une infection ancienne. La ferritine est à 20 ng/ml. La patiente n’est pas en surpoids. Il n’y a pas d’argument en faveur d’une stéatopathie métabolique.
En revanche, le bilan auto-immun retrouve des anticorps anti-nucléaires totaux à 1/160ème d’aspect moucheté mais avec des anti-muscle lisse, anti-mitochondries, anti-LKM1 et anti-cytosol négatifs. Il existe une hypergammaglobulinémie avec des IgG à 24,4 g/l.
Devant l’aggravation du bilan hépatique avec une cytolyse à 500, une biopsie hépatique est réalisée. L’histologie conclut à un parenchyme hépatique normal en dehors d’un discret infiltrat inflammatoire portal.
Finalement, le bilan étiologique met en évidence des anticorps anti-transglutaminase très positifs supérieurs à 300 unités, confirmés par des anticorps anti-endomysium positifs à 1/180. Une endoscopie digestive haute a permis de réaliser des biopsies duodénales retrouvant un aspect d’atrophie villositaire subtotale.
Le diagnostic de maladie coeliaque avec manifestations hépatiques et articulaires est donc porté et le régime sans gluten a donc été débuté. Après 9 mois de régime sans gluten, il existe une amélioration lente de la cytolyse avec des ASAT à 97 et des ALAT à 85.
Les perturbations du bilan hépatique au cours d’une maladie coeliaque sont rares mais décrites, elles surviennent généralement au cours de maladies coeliaques diagnostiquées. La présentation hépatique mimant une hépatite auto-immune est plus exceptionnelle. Néanmoins, il faut savoir évoquer ce diagnostic y compris lorsqu’il existe un tableau d’hépatite auto-immune et proposer le dosage des anticorps anti transglutaminases dans le bilan étiologique avant de réaliser la biopsie.

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Hepatologie

Dépistage et prise en charge des hépatites virales B et C chez les personnes en situation de précarité en hôpital général : étude prospective chez 1812 consultants

2012

I Rosa 1, F Roudot-Thoraval 2, L Costes 1, T Lons 1, V Garrait 3, I Delacroix Szmania 3, B Staedel 4,5, B Elghozi 5,6, H Hagège 1, M Chousterman 4,6
et le Groupe PRECAVIR*
1 Service d’Hépato-gastroentérologie, Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil, 2 Service de Santé Publique, Hôpital Henri Mondor, 3 Service de Médecine Interne, Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil, 4 Réseau ville hôpital Créteil, 5 Réseau de Santé de Créteil Solidarité, 6 Unité Permanence d’Accès aux Soins de Santé et Réseaux, Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil, * Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil,

Hépatologie –  2012-05-07 – CO –

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En France, la prévalence de l’infection par les virus des hépatites est faible : 0,65 % pour l’hépatite B (VHB) et 0,84 % pour l’hépatite C (VHC). Chez les personnes en situation de précarité, la prévalence estimée est deux à six fois plus élevée que dans la population générale. Les migrants cumulent les obstacles à l’accès au dépistage et aux soins. Les hôpitaux généraux jouent un rôle important dans l’accueil des populations fragilisées. Depuis 2002, des permanences d’accès aux soins de santé (PASS) ont été mises en place dans certains hôpitaux pour permettre l’accès aux soins des populations en situation irrégulière ou en grande précarité.
Notre but est de décrire l’expérience d’un hôpital général dans le dépistage du VHB et du VHC chez les migrants et dans l’accès aux soins des personnes dépistées positives.
Méthode : Un dépistage des infections par le VHB, le VHC et le VIH a été proposé systématiquement à chaque nouveau consultant adulte de la PASS d’un hôpital et d’un centre de consultation associatif, situés dans la même ville, quel que soit le motif de consultation. Le prélèvement était fait au centre de dépistage anonyme et gratuit de l’hôpital. L’accès à une consultation d’hépatologie était organisé pour les personnes dépistées positives.
Résultats. – De juin 2007 à décembre 2011, un dépistage a été proposé consécutivement à 1812 personnes parmi lesquelles 93% étaient étrangères (Afrique subsaharienne : 65%, Afrique du Nord : 9%, Europe de l’Est : 4,5%, Asie : 4,5%, Amérique : 4,5%). 91% d’entre elles étaient en séjour irrégulier ou demandeurs d’asile. Le dépistage a été réalisé chez 1394 consultants. Cent trente-neuf consultants, soit 10% des personnes prélevées, avaient au moins une sérologie d’hépatite positive [IC : 8,94-14,35]. S’agissant de l’hépatite B, la prévalence globale était de 6,7% [IC95 : 5,03-9,39], (94 cas), l’âge moyen était de 31 ans et 53% étaient des hommes. Un traitement était indiqué chez 12 des 73 patients ayant bénéficié d’un bilan et il avait pu être débuté chez 6 d’entre eux. S’agissant de l’hépatite C, la prévalence globale de la positivité de la sérologie était de 3,4% [IC95 : 2,85-6,39], soit 47 cas, l’âge moyen était de 42 ans et 44% étaient des hommes. L’ARN du VHC était positif chez 20 des 40 patients testés. Un traitement avait pu être débuté chez 9 des 14 patients encore suivis. Les données actualisées concernant les traitements et leur efficacité dans cette population seront présentées au congrès.

Conclusion. – Notre programme montre la forte prévalence des hépatites virales B et C au sein des populations précaires et/ou migrantes. La proposition systématique de dépistage dès la première consultation est réalisable, bien acceptée et utile . Lorsqu’il était indiqué, le traitement avait pu être initié dans 58% des cas. Les hôpitaux généraux peuvent être un lieu privilégié d’incitation au dépistage dans cette population et faciliter l’accès au suivi et au traitement de leur hépatite. Néanmoins, le suivi des patients reste difficile dans cette population et requiert la mise en place d’un dispositif adapté.

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Hepatologie

ANGH HEPATO HEBDO 2012. Une semaine d’hépatologie dans les hôpitaux généraux.

2012

Condat B (Bry sur Marne), Remy AJ (Perpignan), Jouannaud V (Montfermeil),Lahmek P (Limeil Brevannes) Lesgourgues B (ANGH)

Hépatologie –  2012-05-14 – CO –

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But et contexte : L’ANGH n’a pas de connaissance des « réservoirs » de pathologie à sa disposition pour les différentes études ou observatoires à venir. L’idée de faire un recensement des grands secteurs de pathologie au niveau de l’association découle de cette constatation. Le domaine de l’Hépato-gastroentérologie étant vaste, une étude sur l’Hépatologie permet de faire un galop d’essai avant un recensement des autres pathologies digestives (MICI, cancérologie…). Il paraît difficile dans l’état actuel de nos ressources humaines et matérielles d’envisager un enregistrement au long cours d’une pathologie donnée dans l’optique d’un réseau sentinelle. Les sociétés savantes envisagent la constitution de cohortes dont la gestion risque d’être complexe. Une coupe transversale sur une semaine permet d’allier une meilleure connaissance du vivier de pathologie à une simplification du recueil de données. Comme « une semaine d’endoscopie en France », nous proposons « une semaine d’Hépatologie en France à l’Hôpital général ».
Méthode : Recueil des données dans un maximum de centre de l’ANGH du Lundi au Vendredi sur une semaine définie en dehors des périodes de congé scolaire. Chaque patient sera classé dans une des grandes classes de pathologie (cirrhoses de causes fréquentes, autres hépatopathies chroniques, hépatopathies aigües, pathologies tumorales …) avec typologie de prise en charge (diagnostic, surveillance, traitement, complications) dans trois domaines d’activité :
L’hospitalisation conventionnelle et de semaine
L’hospitalisation de jour ambulatoire endoscopie ou acte externe endoscopie
Consultations (exhaustivité de consultations d’un service)
Recueil des données sur Excel et envoi anonymisé par mail.
Résultats : ils seront présentés au congrès.
Conclusion : Nous espérons contribuer à apporter des réponses aux points suivants : (1) Connaître le réservoir de maladies hépatiques pour les futures études de l’ANGH ; (2) Participer à estimer le poids de l’Hépatologie dans les ressources médicales en France ; (3) Montrer que les hôpitaux généraux prennent en charge une bonne partie des maladies hépatiques fréquentes et graves (cirrhoses, CHC), mais aussi une bonne part des traitements des hépatites virales et des maladies plus rares (hépatites auto immunes, thromboses portales…).

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Hepatologie

L’antibioprophylaxie au cours de la cirrhose : une enquête nationale.

2012

Thierry Thevenot (1), Thibault Degand (1), Natacha Grelat (1), Laure Elkrief (2), Camille Christol (3), Richard Moreau (2), Jean Henrion (4), Jean-François Cadranel (5), Vincent Di Martino (1), Arnaud Pauwels (6), et ANGH.
(1) Service d’Hépatologie et de Soins Intensifs Digestifs, Hôpital Universitaire Jean Minjoz, Besançon, (2) Service d’Hépatologie, Hôpital Beaujon, Clichy, (3) Service d’Hépato-Gastroentérologie, Hôpital Purpan, Toulouse, (4) Service d’Hépato-Gastroentérologie, Hôpital Jolimont, Haine-Saint-Paul, Belgique, (5) Service d’Hépato-Gastroentérologie, Centre Hospitalier de Creil, (6) Service d’Hépato-Gastroentérologie, Centre Hospitalier de Gonesse.

Hépatologie –  2012-05-16 – CO –

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L’antibioprophylaxie dans les hémorragies digestives (HD) de la cirrhose et dans la prévention secondaire (Proph2) et primaire (Proph1) de l’infection spontanée du liquide d’ascite (ISLA) a fait l’objet de recommandations. L’impact de ces recommandations n’a jamais été évalué. Nous avons réalisé une enquête nationale de pratique dans les centres hospitaliers généraux (CHG) et universitaires (CHU).
Méthodes : Un auto-questionnaire a été envoyé à tous les praticiens de CHG et de CHU exerçant dans un service d’hépato-gastroentérologie. 389 praticiens (hommes 62%, CHG 72%, âge moyen 44 ans), soit 33,6% des praticiens sollicités, ont répondu à cette enquête.
Résultats : Une antibioprophylaxie était prescrite par 97,7% d’entre eux dans la prise en charge des HD de la cirrhose (chez >75% des patients par 82,9%). Les antibiotiques utilisés étaient : quinolones 42,8%, C3G 27,7%, amoxicilline-acide clavulanique 22,2%, autres antibiotiques 1,9%. La durée moyenne de l’antibioprophylaxie était de 6,1±1,7 jours. La prescription d’une antibioprophylaxie dans l’HD (CHU vs. CHG) était principalement motivée par la diminution du risque infectieux (94,3% vs 86,8% ; p=0,036), l’amélioration de la survie (81,1% vs 69,6%; p=0,023) et les recommandations d’une conférence de consensus (95,3% vs 78,1%; p75% des patients par 82,9% et 33,3%, respectivement). Les quinolones représentaient respectivement 99% et 97% des antibiotiques utilisés. Pour la Proph2 de l’ISLA, les praticiens des CHU étaient davantage influencés par les recommandations d’une conférence de consensus (89% vs 68%; P<0,001). La durée de la Proph2 et de la Proph1 était respectivement à vie (34% et 19% des praticiens), jusqu’à la disparition de l’ascite (67% et 70%), ou jusqu’à la transplantation (45% et 45%). Les patients concernés par la Proph1 étaient principalement ceux ayant un taux bas (75% des cas) d’une antibioprophylaxie était associée : 1) pour les HD, au nombre de patients ascitiques traités par mois (>12 vs 95% des praticiens) dans les HD de la cirrhose et dans la prévention secondaire de l’ISLA, en accord avec les recommandations des conférences de consensus. Alors que l’intérêt d’une prévention primaire de l’ISLA est discuté, près de 75% des praticiens y ont recours, principalement quand le taux de protéines dans l’ascite est <15 g/l. Les quinolones restent les antibiotiques les plus prescrits quelque soit l’indication de prophylaxie.

Catégories
Hepatologie

Intérêt et tolérance du baclofene dans le traitement de l’alcoolodépendance chez des patients avec ou sans cirrhose

2012

Hortensia Lison (1), Camille Barrault (2), Marie Cordonnier (1), Isabelle Rosa (2), Emmanuelle Sarlon (1), Djamel Belloula (1), Georges Pulwermacher (1), Hervé Hagege (2), Jean-François Cadranel (1)
1- Service d’Hépatogastroentérologie et de Nutrition, Equipe alcoologie et DIM GHPSO Site de Creil
2- Service d’Hépatogastroentérologie et Equipe de Liaison et de Soins en Addictologie – Centre Hospitalier Intercommunal de Créteil

Hépatologie –  2012-08-11 – CO –

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I – Rationnel et But de l’étude
Rationnel
Le Baclofene (BAC) est un agoniste récepteur de l’acide gamma-aminobutyrique B (GABA), molécule utilisée depuis plusieurs décennies dans les contractures spastiques de la sclérose en plaque et d’élimination essentiellement rénale.
En 2007, une étude randomisée contrôlée en double aveugle utilisant le baclofene à la posologie de10mg trois fois / j (dose modérée) a été conduite chez 84 patients cirrhotiques alcoolodépendants montrant une amélioration significative en terme de craving, de rechute et d’abstinence [1].
Depuis juin 2010, nous avons utilisé au cas par cas au GHPSO et au CHIC le baclofene dans le cadre de l’alcoolo-dépendance chez des patients avec ou sans cirrhose.
En Avril (AFSSAPS) [2] puis à l’EASL 2012 [3], les possibilités d’utiliser du BAC sous condition ont été rapportés chez des malades alcoolodépendants sévère (SAD) avec ou sans cirrhose.

But de l’étude
Evaluer l’efficacité et la tolérance du baclofène chez des patients alcoolo-dépendants avec ou sans cirrhose pris en charge dans 2 services d’Hépatogastroentérologie de Centre Hospitalier Général. Rapporter lors du Congrès de l’ANGH, les résultats préliminaires de l’utilisation du BAC chez ces patients, les résultats, à la date “censurée “du 31 juillet 2012 seront rapportés à Bastia.
II – Patients et méthodes
Tous les patients, consécutifs traités par baclofène de juin 2010 à 31 mai 2012 dans les services d’hépato-gastroentérologie des CHG de Creil et de Créteil, en hospitalisation ou en consultation ont été inclus.
Une fiche d’information était remise aux patients avant le début du traitement. Le traitement était initié à la posologie progressive de 15 mg/j en 3 prises avec des paliers de 3 à 7 jours entre chaque augmentation de posologie (15 mg/j).

III- Résultats (préliminaires): Caractéristiques des malades
GHPSO Creil (site1) : 24 malades dont 2 femmes et 22 hommes d’âge médian 45 ans (35 – 63) ont été inclus, 15 d’entre eux étaient cirrhotiques (62,5%), dont six patients étaient Child-Pugh A (40%), 4 étaient B (26,6%) et 5 étaient C (33,3%).
Tous les malades avaient eu un ou plus d’épisode de delirium tremens.
Vingt et un malades sont traités actuellement. Deux patients ont dû arrêter le traitement pour des effets secondaires (sensation vertigineuse dont l’une apparue après 4heures de traitement) et un troisième patient a reçu le BAC jusqu’à son transfert en réanimation hépatologique (deux mois) en vue d’une transplantation hépatique.
CHIC (site 2) : sept hommes et 1 femme d’âge médian 55 ans (30-67) ont été traités par baclofène. Trois patients étaient cirrhotiques avec un score de Child Pugh A5 (100%).
Sept patients sont traités actuellement. Un patient non cirrhotique a arrêté très précocement le traitement pour somnolence (non objectivée).
Les résultats en termes de diminution du craving, d’abstinence, de rechute, d’arrêt du traitement et d’amélioration secondaire des fonctions hépatiques chez les malades alcoolodépendants cirrhotiques seront présentés à Bastia.

IV- Conclusion
Le baclofène semble bien toléré y compris chez les patients cirrhotiques. Ces données préliminaires encourageantes nous conduisent à proposer une étude longitudinale au sein de l’ANGH dans le traitement des patients atteints de SAD avec ou sans cirhhose.
Références
[1]. Addolorato G et al. Effectiveness and safety of baclofen for maintenance of alcohol abstinence in alcohol- dependent patients with liver cirrhosis randomised, double-blind controlled study. Lancet 2007; 370: 1915-1922.
[2] Utilisation du baclofene dans le traitement de l’alcoolo-dépendance actualisation et point d’information. AFSSAPS 25/04/2O12
[3] Addolorato G. Management of alcohol dependence in patients with alcoholic liver disease. EASL Avril 2012, 81-86.