2005
Bernard Denis, André Peter
Service de Médecine A – Hôpitaux civils de COLMAR (Haut-Rhin)
Endoscopie – 2005-06-23 – COS –
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La cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique (CPRE) a les caractéristiques requises pour relever d’un programme d’amélioration de la qualité : c’est un examen complexe, à risque et coûteux qui mobilise des ressources importantes. L’American Society for Gastrointestinal Endoscopy recommande l’adoption d’une démarche d’amélioration de la qualité avec enregistrement systématique d’un certain nombre d’indicateurs. Le but de ce travail était d’évaluer la qualité des CPRE réalisées dans notre unité d’endoscopie dans le but de l’améliorer.
Patients et méthodes : Audit prospectif de 400 CPRE consécutives réalisées par deux opérateurs entre le 1/7/2002 et le 15/3/2005. 45 critères de processus et de résultats étaient colligés pour chaque examen. Les complications étaient recensées sur un registre morbi-mortalité.
Résultats : les CPRE concernaient 239 femmes et 161 hommes d’âge moyen de 69 ans (extrêmes 21-99 ans). 27,5 % d’entre eux provenaient d’un autre établissement. 28,3 % avaient un score ASA 3. Les 2 opérateurs se partagaient respectivement 55,5 % et 40,5 % des examens et 4 % étaient réalisés à 4 mains.
143 CPRE (35,8 %) étaient précédées d’une échoendoscopie (EE) réalisée dans 133 cas (93 %) au cours de la même anesthésie (65 fois pour pathologie lithiasique, 48 fois pour pathologie tumorale). Au cours de la même période, 454 EE bilio-pancréatiques étaient réalisées dont 217 (47,8 %) en salle de radiologie pour permettre la réalisation, si nécessaire, d’une CPRE immédiatement après l’EE au cours de la même anesthésie générale. Les résultats de ces EE préalables permettaient d’éviter la réalisation d’une CPRE dans 84 cas (38,7 %).
L’indication de la CPRE était diagnostique dans 36 cas (9 %), thérapeutique dans 182 cas (45,5 %) et mixte dans 182 cas (45,5 %). Les principales indications étaient : lithiase biliaire (n = 263 soit 65,8 %), pathologie tumorale (n = 108 soit 27 %) , pathologie inflammatoire (n = 25) et complications post-opératoires (n = 5). Il s’agissait d’un premier examen sur papille « vierge » dans 82,8 % des cas et d’une deuxième tentative après échec préalable dans 3 % des cas (la moitié avec opérateur différent). Dans 57 cas (14,3 %), la papille était le siège d’une sphinctérotomie préalable. La papille était en situation anatomique normale dans 335 cas (83,8 %), juxta-diverticulaire dans 54 cas (13,5 %) et intra-diverticulaire dans 15 cas (3,8 %). Deux CPRE ont été réalisées dans un contexte de gastrectomie avec anastomose selon Polya et 7 avec un drain transcystique en place. En intention de traiter, les taux de succès étaient respectivement de 91,5 % pour la cholangiographie, 95,7 % pour la Wirsungographie, 89,1 % pour la sphinctérotomie, 88,6 % pour l’extraction de calculs et 76,1 % pour la pose de prothèse biliaire. Une infundibulotomie était nécessaire dans 31 cas (7,8 %). Elle permettait d’accéder aux voies biliaires dans 87,1 % des cas (71 % au cours de la même séance et 16,1 % lors d’une deuxième tentative ultérieure). Le taux de succès de la cholangiographie variait significativement selon les conditions anatomiques et l’indication : anatomie normale (93 %), papille juxta-diverticulaire (94,3 %), papille intra-diverticulaire (53,3 %), gastrectomie selon Polya (50 %) ; drain d’Escat en place (100 %) ; pathologie lithiasique (94,7 %) et pathologie tumorale (86,8 %) (p < 0,01). En pathologie lithiasique, la vacuité de la voie biliaire principale n’était pas obtenue dans 30 cas (11,4 %) : 14 échecs de cholangiographie, 3 échecs de sphinctérotomie et 13 échecs d’extraction des calculs. Une lithotritie mécanique était nécessaire dans 46 cas (17,5 %). En pathologie tumorale, 21 échecs de drainage des voies biliaires étaient comptabilisés (23,9 %) : 14 échecs de cholangiographie dont 2 dus à une sténose digestive empêchant d’accéder à la papille, 2 échecs de sphinctérotomie et 5 échecs de pose de prothèse. Les taux de succès n’étaient pas significativement différents entre les 2 opérateurs, sauf pour la cholangiographie dans un contexte tumoral (p < 0,01). Dans 16 cas d’échec de cholangiographie, le changement d’opérateur débouchait 3 fois sur 4 sur un succès.
18 complications (4,5 %) étaient colligées dans notre registre : 3 pancréatites aiguës dont 1 sévère, 3 angiocholites, 3 abcès hépatiques, 1 cholécystite aiguë précoce, 1 perforation de sinus piriforme, 1 hémorragie et 4 complications cardio-respiratoires dont 1 décès par arrêt cardio-circulatoire. Il n’y avait pas de différence selon l’opérateur, l’indication et selon qu’il y ait eu ou non infundibulotomie. L’analyse des coûts des matériels utilisés est en cours.
Conclusion : cet audit nous a permis de nous évaluer et de modifier certaines de nos pratiques pour améliorer la qualité de nos CPRE : travail à 4 mains, recours à une deuxième tentative en cas d’échec. Nos résultats, reflets de la vraie vie, sont comparables à ceux publiés dans la littérature.