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OHDHAF : Observatoire Hémorragies Digestives Hautes en Afrique Francophone. Méthodes et résultats préliminaires d’une aventure africaine de l’ANGH.

2010

Hervé HAGÈGE, Bruno LESGOURGUES et Olivier NOUEL.

Vie Professionnelle –  2010-06-07 –  –

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Notre aventure africaine a commencé fin 2008, à Fès, lors du XIème congrès de l’AAFFCHGE (Association Africaine Francophone de Formation Continue en Hépato-Gastroentérologie) où l’ANGH avait été invitée à présenter son expérience sur les études multicentriques et les résultats de quelques observatoires nationaux. Cette expérience de la « vraie vie » a soulevé beaucoup d’intérêt et une adhésion unanime a été obtenue pour travailler ensemble à l’élaboration d’un observatoire à l’échelle du continent africain. Le choix du premier observatoire a porté sur les hémorragies digestives hautes qui représentent l’une des principales urgences hépato-gastroentérologiques en Afrique.
Méthodes : Un conseil scientifique composé d’hépato-gastroentérologues du Nord et du Sud a été mis en place et un observatoire simple, mais réaliste a été élaboré. A l’échelle du continent africain, il n’était pas envisageable d’utiliser comme à l’ANGH des cahiers d’observation qui transiteraient par des coordinateurs avant une centralisation des données. Il a été mis en place tout spécialement pour OHDHAF un outil de saisie via Internet, disponible partout en Afrique. Ces données sont sécurisées, avec un accès pour chaque centre à la totalité de ses inclusions. Les données sont ainsi immédiatement exploitables pour des études statistiques. Cet outil extrêmement performant pourra d’ailleurs être utilisé pour les futurs observatoires de l’ANGH. OHDHAF a obtenu des soutiens financiers industriels et institutionnels pour pouvoir démarrer. Il a été présenté à Yaoundé, en octobre 2009 au XIIème congrès de l’AAFFCHGE et a débuté le 1er janvier 2010. Entre l’idée et le début du protocole, grâce à l’enthousiasme suscité et aux soutiens rapidement obtenus, à peine 14 mois se sont écoulés. L’objectif principal de cette étude est de décrire les caractéristiques épidémiologiques actuelles des HDH communautaires et également les pratiques professionnelles, la morbidité et la mortalité hospitalière en Afrique.
Résultats : Quinze pays africains et plus de 60 centres participent à ce protocole. Après des débuts laborieux, plus de 800 patients ont été inclus en 5 mois avec un recrutement qui devient exponentiel et permet d’espérer plus de 3000 inclusions d’ici le 31 décembre 2010, date de fin des inclusions. Voici les résultats préliminaires au 21 mai 2010. 690 inclusions ont été réalisées dans 8 pays : Algérie, Burkina Fasso, Burundi, Cameroun, Côte d’Ivoire, Maroc, Sénégal et Tchad. Il s’agissait de 421 hommes et 269 femmes âgés en moyenne de 50,4 ± 19,0 ans. L’hémorragie était révélée par une hématémèse dans 75% des cas, un méléna dans 23% des cas et une anémie aiguë dans 2% des cas. 54% des patients avaient des problèmes hémodynamiques à l’arrivée : pression artérielle systolique 100/min. L’hémoglobinémie était en moyenne à 9,3 ± 3,1 g/dl. La prise de médicaments pouvant favoriser ou aggraver l’hémorragie était peu fréquente : aspirine 12,5%, AINS 11,7%, anticoagulant 3,3%, antiagrégant plaquettaire 1,9%. Une endoscopie a été réalisée chez 88,1% des patients. Il existait un saignement actif dans 16,1% des cas et un geste d’hémostase a pu être réalisé dans 14,6% des cas. La principale cause de l’hémorragie était l’ulcère duodénal : 26,6%, puis la rupture de varices œsophagiennes ou cardio-tubérositaires: 21,8%. Seulement 60% des patients ont été hospitalisés. 37% ont été transfusés de 3,1 ± 1,7 unités. Des IPP ont été utilisés chez 60% des patients et des produits réduisant l’hypertension portale chez 6,6% des patients. Une récidive hémorragique a été observée dans 5,4% des cas et la mortalité n’a été que de 5,1%. L’hémorragie elle-même était la principale cause du décès.
Conclusion : L’ANGH s’investit dans la réalisation d’observatoires multicentriques à l’échelle du continent africain. OHDHAF est le premier observatoire de ce type. Les résultats intéressants et le fonctionnement satisfaisant permettent d’envisager pour l’ANGH d’autres aventures africaines…