2024
S Ben Jemmia(1), M Iboudo (2), C Amouroux (1), B Tissot (1), MC Ortiz (1), C Soriano (1), D Lippai (1), O Farah (1), AJ Remy(1),
F Khemissa Akouz (1).
(1) Centre hospitalier de Perpignan
(2) CHU Yalgado ouedraogo burkina Faso
(2)
Gastroentérologie – 08/05/2024 – Communication orale
Chez un patient devant bénéficier d’une intervention chirurgicale, la présence d’une dénutrition en préopératoire constitue un facteur de risque indépendant de complications postopératoires. La dénutrition augmente la morbidité (infections, retard de cicatrisation), la mortalité, la durée de séjour et les coûts et retentit sur la qualité de vie des patients. Il a été démontré que la prise en charge préopératoire de la dénutrition permettait de réduire le risque supplémentaire généré par celle-ci. Il faut probablement prendre en compte à la fois l’état nutritionnel, les différents facteurs de risque de dénutrition périopératoire et le risque lié à l’acte chirurgical. Une stratification du risque global est proposée par la conférence de consensus de 2010 :
Grade nutritionnel 1 (GN 1) Patient non dénutri
Et chirurgie non à risque élevé de morbidité ET pas de facteur
de risque de dénutrition
Grade nutritionnel 2 (GN 2) : Patient non dénutri
ET présence d’au moins un facteur de risque de dénutrition
OU chirurgie avec un risque élevé de morbidité
Grade nutritionnel 3 (GN 3) Patient dénutri
Et chirurgie non à risque élevé de morbidité
Grade nutritionnel 4 (GN 4) Patient dénutri
Et chirurgie non à risque élevé de morbidité
Matériels et méthodes
Il s’agit d’une étude rétrospective, monocentrique, analytique, menée au centre hospitalier de Perpignan entre 01/2023 et 06/2023 colligeant les patients pris en charge par chirurgie carcinologique digestive ou ORL.
Nous avons utilisé les critères de dénutrition selon HAS avec un diagnostic posé si l’un de ces critères était retrouvé : perte de poids récente d’au moins 10%, IMC ≤ 18,5 ou un IMC < 21 chez le sujet de plus de 70 ans, ou albuminémie < à 30 g/L indépendamment de la CRP ;
Le grade nutritionnel a été recherché dans le dossier sinon calculé à posteriori. Nous avons noté la prise en charge proposée aux patients : consultation diététique, prescription de CNO et ou de nutrition artificielle. Les complications post opératoires de type infectieuses ou défaut de cicatrisation ont été rapportées
Résultats
100 dossiers de patients consécutifs ont été analysés. 9 ont été exclues pour pathologie non cancéreuse. Au final, nous avons inclus un total de 91 patients. Le sexe ratio était de 35 femmes /56 hommes. .
Les principaux facteurs de risques de dénutrition étaient : un cancer évolutif concernant 100% de patients, un âge supérieur à 70 ans qui concernait 52 (57%) patients, une insuffisance d’organe chez 36% des patients et une polymédication retrouvée chez 27(30%) patients.
La dénutrition a été diagnostiquée chez 55 patients (61%). Tous les patients dénutris étaient grade 4. Moins de la moitié seulement avaient eu un conseil diététique (21 patients soit 38%) 15 avaient soit des CNO (10 patients) soit une nutrition artificielle (5 patients ), entérale chez 4 patients et parentérale pour 1. Les autres patients avaient un grade nutritionnel 2.
27 complications (30%) ont été rapportées. Elles étaient de type défaut de cicatrisation (11 patients) ou infectieuses (10 patients) ou les 2 (6 patients). La majorité (80 %) des patients était classée grade 4 (1 grade non déterminé) .
L’analyse des facteurs associés à la morbidité post-opératoire retrouve en analyse univariée que la survenue d’une infection post-opératoire est associée de manière significative à la dénutrition (p =0,021) et à un grade nutritionnel à 4 (p= 0,022). En analyse multivariée, la dénutrition semble être un facteur de risque indépendant de complications infectieuses post-opératoire (OR: 10,25 (2,07 ; 50,71), p =0,0043.) En ce qui concerne le défaut de cicatrisation, les facteurs qui y étaient significativement associés en analyse univariée étaiet la dénutrition (p=0.03) et un grade nutritionnel à 4 ( p=0.006). En analyse multivariée, les antécédents de chirurgie digestive majeure étaient associés à un défaut de cicatrisation (OR : 7,90 (1,18 ; 52,96) p= 0.03). Inversement la prise de CNO était associée à une meilleur cicatrisation (OR 4,68 avec un p à 0,0085)
Conclusion :
Nous avons confirmé par cette étude que la dénutrition, ainsi qu’un grade nutritionnel à 4 sont des facteurs de risque de morbidité post-opératoire. Cela confirme l’importance de l’évaluation nutritionnelle avant la chirurgie et d’appliquer les recommandations de la SFNCM de grader les patients pour leur proposer une prise en charge adaptée en matière de prise en charge nutritionnelle péri-opératoire. Recommandation émise en 2010 et pourtant loin d’être appliquée dans les structures de soins