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Hepatologie

HEPATITE AIGUË CYTOLYTIQUE ET CHOLESTATIQUE SECONDAIRE A LA PRISE D’HERBES CHINOISES (POLYGONUM MULTIFLORUM)

2020

POLIN Vanessa
GRIMBERT Sylvie

Hépatologie –  2020-07-03 – CC –

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Nous rapportons le cas d’une femme de 68 ans atteinte d’une hépatite aiguë d’origine toxique associée à la prise d’herbes chinoises Polygonum multiflorum. Le diagnostic est basé sur l’interrogatoire du patient et l’élimination d’autres causes possibles d’hépatite aiguë. L’imputabilité de la prise d’une substance toxique en cas d’hépatite doit être évaluée par le score RUCAM. La toxicité de Polygonum Multiflorum a déjà été rapportée dans plusieurs études. Le mécanisme d’hépatotoxicité peut être de type idiosyncrasique ou intrinsèque. Ce cas illustre le problème du manque d’information de la population et de son accès incontrôlé à des substances présentant une hépatotoxicité connue ou suspectée.

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Endoscopie

Comment évaluer les performances d’un endoscopiste en coloscopie : quels indicateurs ? quels standards ?

2020

Bernard Denis, Isabelle Gendre, Philippe Perrin, Nicolas Tuzin
ADECA Alsace Colmar, CHU Strasbourg

Endoscopie –  2020-06-19 – CO –

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Tout programme d’amélioration de la qualité de la coloscopie intègre l’évaluation des performances de l’endoscopiste. Outre le taux de coloscopies complètes, le principal indicateur est le taux de détection des adénomes (TDA). Il a pourtant ses limites : binaire, il dépend du résultat anatomopathologique et ne prend pas en compte les adénomes avancés, le nombre d’adénomes réséqués ni la voie festonnée. Le but de ce travail était d’évaluer d’autres indicateurs de performances et de proposer des standards pour le programme français de dépistage organisé du cancer colorectal par test immunologique (FIT).

Méthodes : Evaluation des performances des endoscopistes sur toutes les coloscopies FIT+ réalisées en Alsace lors des deux 1ères campagnes FIT (C1 et C2) (juin 2015 – juin 2019). Seuls étaient évalués les endoscopistes ayant fait ≥ 30 coloscopies. Les indicateurs étaient groupés en 3 catégories évaluant les capacités de détection, de diagnostic optique de lésion néoplasique et de polype dégénéré pT1, et de polypectomie.

Résultats : Un total de 14.228 coloscopies FIT+ étaient réalisées par 116 endoscopistes. 773 (5,4%) révélant un cancer étaient exclues, de sorte que 13.455 coloscopies étaient évaluées (moyenne d’âge 62,4 ans, hommes 59,6%). Le nombre de coloscopies par endoscopiste variait de 1 à 623 (moyenne 116, médiane 85). 42 (36,2%) endoscopistes réalisant < 20 coloscopies FIT+ annuelles étaient qualifiés à faible volume. Globalement, le taux d’intubation caecale (TIC) était de 97.1%. 7 endoscopistes (6,0%) avaient un TIC < 90%, et 16 (13,8%) entre 90 et 95%. Le TIC était < 90% chez 12.5% des endocopistes à faible volume, significativement supérieur à 1,5% chez ceux à gros volume (p=0.01). Il n’y avait pas de corrélation entre le volume de coloscopies de l’endoscopiste et la plupart des indicateurs de détection, à l’exception du taux de détection de lésions festonnées proximales (> angle gauche) (TDLFprox), significativement plus élevé chez les endoscopistes à gros volume (7,8%) que chez ceux à faible volume (5,9%) (p=0.01).
Un total de 388 coloscopies par 36 endoscopistes réalisant < 30 coloscopies dans la période étaient exclues des analyses suivantes qui portaient sur 13.067 coloscopies réalisées par 80 endoscopistes. Il n’y avait pas de différence de TDA global entre C1 (58,0%) et C2 (57.0%)(p=0,2). Par contre, le TDLFprox augmentait significativement de 7,0% en C1 à 8,5% en C2 (p<0,01). Les TDA et TDLFprox variaient selon l’endoscopiste, respectivement de 27,8% à 81,0% et de 0% à 24,6%. Leur corrélation était assez bonne (Pearson = 0,7, p<0.01). Alors que 5/72 (6,9%) endoscopistes avaient un TDA ≥ 45% et un nombre moyen d’adénomes (NMA) < 0,8, un seul sur 48 (2,1%) avait un TDA ≥ 55% et un NMA < 0,8. De même, alors que 36,1% des endoscopistes avaient un TDA ≥ 45% et un TDLFprox < 4%, seuls 4,2% avaient un TDA ≥ 55% et un TDLFprox < 4%. Le TDLFprox était > 1% chez 94% des endoscopistes et > 5% chez 62,5%. Les nombre moyen d’adénomes et nombre moyen d’adénomes par coloscopie avec adénome n’apportaient aucun renseignement supplémentaire par rapport au TDA au seuil de 55%.
En analyse multivariée, les facteurs liés significativement au TDA étaient le sexe, l’âge, les antécédents de dépistage, le taux d’hémoglobine fécale, le TIC < 90%, et l’endoscopiste. Une augmentation de 10 μg/g du taux d’hémoglobine fécale était associée à une élévation de 2% du TDA. Le mode d’exercice, l’année, le délai entre test et coloscopie, et le volume de coloscopies n’étaient pas significativement liés. Les facteurs liés significativement au TDLFprox étaient le sexe, les antécédents de dépistage par coloscopie, le TIC < 90%, et l’endoscopiste. Au total, et tenant compte pour le calcul du TDA de l’intervalle de confiance à 95% lié au nombre de coloscopies évaluable pour chaque endoscopiste, 2485 patients (18,5%) étaient explorés par 25 endoscopistes (21,6%) dont le TDA était suboptimal, < 55%. Les capacités de diagnostic optique des endoscopistes étaient évaluées par le taux de détection des lésions non néoplasiques (TDLNN) et les sensibilité et valeur prédictive négative pour le diagnostic de polype dégénéré (pT1). Le TDLNN variait de 0 à 73,2% (moyenne 24,5%). Sa corrélation avec le TDA était moyenne (Pearson = 0,24, p=0.03). Le TDLNN des endoscopistes dont le TDA était > 70% était de 39,5%, significativement supérieur à celui des endoscopistes dont le TDA était ≤ 70% (21,4%, p<0,001). Des seuils minimal < 30% et cible < 25% sont proposés pour le TDLNN. La sensibilité pour le diagnostic de polype dégénéré (pT1) était de 44,9% (27,0% pour les pédiculés et 54,3% pour les non pédiculés), la valeur prédictive négative de 94,6%. Les compétences en polypectomie étaient évaluées par le taux de résection endoscopique des gros polypes bénins ≥ 20 mm (TREPB+20). Il était de 82,7% chez 1057 patients, 67,4% dès la coloscopie initiale, 7,6% lors d’une 2ème coloscopie par le même endoscopiste, et 7,8% par un autre endoscopiste. Il était de 95,2% pour les gros polypes pédiculés, 70,2% pour les non pédiculés (p<0.001). Il augmentait significativement de 78,3% en 2015-16 à 85,9% en 2017-18 (p<0.01). Il variait de 0 à 100% selon l’endoscopiste (médiane 72,0%), était ≥ 90% chez 24,8% des endoscopistes (91,3% chez 4 experts) et < 80% chez 58,4%. Il n’y avait aucune corrélation entre TREPB+20, indicateurs de détection et volume de coloscopies. Seuls 85 patients (7,3%) étaient adressés pour résection endoscopique à un collègue plus expérimenté. Au total, 60 à 90% des résections chirurgicales pour gros polype bénin étaient considérées comme abusives, soit 110 à 165 patients. Conclusion : Cette étude montre la persistance d’énormes disparités de performances entre endoscopistes. A condition d’élever le standard souhaitable entre 55% et 70% pour les coloscopies FIT+, le TDA suffit comme seul indicateur de détection. Un endoscopiste dont le TDA est ≥ 55% (environ la moitié des endoscopistes) est un bon détecteur d’adénomes, d’adénomes multiples et d’adénomes/polypes festonnés sessiles. Les performances de diagnostic optique de lésion non néoplasique et de polype dégénéré pT1 sont nettement inférieures dans la vraie vie que dans les séries d’experts. Les compétences en polypectomie sont elles aussi très disparates avec un taux de recours excessif au chirurgien en cas d’échec. Un volume annuel de coloscopies FIT+ < 20 est corrélé à un taux significativement plus faible de coloscopies complètes, de détection de lésions festonnées proximales et un taux plus élevé de résection de lésions ni néoplasiques ni festonnées qui devraient être laissées en place. Près d’un patient sur 5 ne bénéficie pas d’une prise en charge optimale suite à un test FIT+… ce qui pose la question de la pertinence d’une certification, voire d’une accréditation des endoscopistes participant au programme national de dépistage organisé.

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Hepatologie

Prise en charge de la NASH en CHG : résultats d’une enquête de pratique nationale.

2020

A. Garioud (1) ; A. Baron (2) ; I. Rosa (3) ; B. Lesgourgues (4) ; C. Renou (5)
1. Villeneuve-Saint-Georges; 2. Évry; 3. Créteil; 4. Bry-sur-Marne; 5. Hyères

Hépatologie –  2020-06-14 – CO –

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Introduction
La stéato-hépatite dysmétabolique (NASH) est une maladie émergente en France. La cohorte «Constances» a évalué la fréquence de cette pathologie avec une stéatose à 18,2% de la population étudiée dont 2,6% avec une fibrose sévère. A ce jour, il n’existe aucune donnée sur la prise en charge de ces patients dans les centres hospitaliers non tertiaires français. Le but de cette étude est de recenser les pratiques des hépato-gastroentérologues des hôpitaux généraux de l’ANGH dans la prise en charge des patients atteints de NASH.

Matériels et Méthodes
Un questionnaire a été établi puis envoyé par mail aux membres de l’ANGH. Les réponses étaient renseignées en ligne au cours d’une période d’un mois entre août et septembre 2019. L’exploitation des résultats a été effectuée par une analyse descriptive simple.

Résultats
78 praticiens (P) dont 95% étaient PH ont répondu à l’enquête : 27 avaient une orientation hépatologique, 15 gastroentérologique et 34 étaient polyvalents. Les patients NASH étaient adressés majoritairement par des généralistes (60%) et des diabétologues (26%) dans le cadre d’un bilan de perturbation des tests hépatiques dans 56% des cas. Les critères diagnostiques présomptifs de NASH étaient l’association d’un syndrome métabolique (86% des P), d’une perturbation des tests hépatiques (62%) et d’une stéatose échographique (63%) en l’absence d’autre hépatopathie (68%) et de consommation d’alcool significative (55%). Le bilan initial comportait systématiquement un dosage de la glycémie à jeun et un test non invasif de fibrose. Une IRM hépatique de quantification de la stéatose était parfois réalisée par 1 P sur 2. Pour l’évaluation de la fibrose hépatique (F), le fibroscan était plébiscité par 86% des P alors que le NAFLD-fibrosis score ne l’était que par 27%. Si le fibroscan était réalisé en premier, un biomarqueur lui était associé majoritairement en cas de F≥2 alors que si un biomarqueur était réalisé en premier, celui-ci était majoritairement couplé à un fibroscan. Une biopsie hépatique à visée diagnostique était effectuée en cas de doute diagnostique (81%) ou en cas d’autre hépatopathie (45%) mais était exceptionnellement systématique (5%). Pour le diagnostic de la F, la biopsie hépatique était réalisée par 64% des P si les tests non invasifs étaient discordants ou si les tests orientaient vers une fibrose significative ou une cirrhose (35% des P). Tous les P préconisaient une réduction pondérale et la pratique d’un exercice physique régulier. Le recours à une diététicienne était proposé par 79% des P (en cas d’échec de prise en charge personnelle pour 63% des P). Aucun médicament n’était instauré par 1 P sur 2. Si un traitement était prescrit, il s’agissait dans 29% des cas de la metformine en cas de diabète de type 2, de la vitamine E dans 23% des cas et de l’AUDC dans 18% des cas. Des ordonnances de sport n’étaient prescrites que par 13% des P. Dans tous les cas, il n’existait aucun programme d’ETP spécifique mais 33% des P incluaient leurs patients dans un autre programme existant (diabète, obésité…). La surveillance clinico-biologique était le plus souvent semestrielle (51%) ou trimestrielle (31%). Il s’agissait pour tous les P de surveiller le poids et les tests hépatiques puis la glycémie à jeun (78%), la créatininémie (62%), la ferritinémie (59%) et les tests lipidiques (58%). Les tests de F étaient majoritairement refaits tous les 3 ans en cas de F<2, tous les 2 ans en cas de F=2, tous les ans en cas de F=3 et jamais en cas de cirrhose. Le dépistage du CHC par échographie était majoritairement effectué en cas de F=3 (76% des P) ou de cirrhose (94%) mais peu en cas de F=2 (9%). Conclusion Les patients atteins de NASH sont majoritairement adressés par le médecin généraliste. Le diagnostic de NASH est le plus souvent présomptif avec un exceptionnel recours à la biopsie hépatique. Le fibroscan est très largement plébiscité pour l’évaluation de la fibrose hépatique. La prise en charge repose sur le changement de mode de vie (réduction pondérale et exercice physique) avec l’aide d’une diététicienne et un faible recours à un traitement médical. Enfin, l’ETP spécifique n’est pas assez représentée alors qu’elle pourrait valoriser la prise en charge de ces patients.

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Hepatologie

EFFET BÉNÉFIQUE DE LA COMBINAISON FIBRATES, ACIDE OBÉTICHOLIQUE ET ACIDE URSODÉSOXYCHOLIQUE DANS LE TRAITEMENT DE LA CHOLANGITE BILIAIRE PRIMITIVE AVEC RÉPONSE INCOMPLÈTE AUX THÉRAPIES DE 2ème LIGNE

2020

Pierre-Antoine Soret1, Laurent Lam1, Fabrice Carrat1, Lena Smets2, Vincent Leroy3, Thomas Berg4, Marco Carbone5, Pietro Invernizzi5, Palak Trivedi6, Christina Weiler-Normann7, Laurent Alric8, Isabelle Rosa-Hezode3, Jean-Paul Cervoni9, Jérôme Dumortier10, Pascal Potier11, Olivier Roux12, Christine Silvain13, Cynthia Levy14, Albert Pares15, Christoph Schramm16, François Boer1, Frederik Nevens2, Olivier Chazouillères1, Christophe Corpechot1

Hépatologie –  2020-07-06 – CO –

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L’acide obéticholique (AOC) et le bézafibrate sont les deux seuls médicaments à avoir montré un effet bénéfique significatif sur les paramètres biologiques des patients atteints de cholangite biliaire primitive (CBP) avec réponse incomplète à l’acide ursodésoxycholique (AUDC). En revanche, on ne sait pas si l’association d’AOC et de fibrates en ajout à l’AUDC peut avoir des effets bénéfiques complémentaires chez des patients en réponse incomplète aux traitements de 2ème ligne.
Méthodes :
Cette étude de cohorte rétrospective multicentrique a inclus des patients atteints de CBP ayant tous été traités pendant au moins 12 semaines et sans intolérance évidente par une combinaison d’AOC (5-10 mg/j), de fibrates (bézafibrate 400 mg/j ou fénofibrate 200 mg/j) et d’AUDC (13-15 mg/kg/j) en raison d’une réponse incomplète selon les critères de Paris-2 à l’un des traitements de 2ème ligne. La date de référence était la date d’introduction du traitement de 2ème ligne. Les tests biologiques hépatiques mesurés sous bi- puis tri-thérapie ont été recueillis. Le critère de jugement principal était le taux de variation des phosphatases alcalines (PAL) par unité de temps. Les critères de jugement secondaires étaient le taux de normalisation des PAL et les taux de variation par unité de temps de la bilirubine totale, de la GGT, des ASAT et ALAT et du score de prurit. Ces critères ont été évalués à l’aide de modèles linéaires à effets mixtes ajustés sur l’âge, le sexe et la posologie des médicaments.
Résultats :
50 patients provenant de 16 centres et de 7 pays (France, Belgique, Allemagne, Italie, Royaume Uni, Espagne, USA) ont été inclus : âge moyen (déviation standard) à la date de référence 49,7 (11,1) ans; sexe féminin 88%; dose d’AUDC 15,2 (2,9) mg/kg/j; PAL 370 (240) UI/L; bilirubine total 14,8 (8,7) µmole/L; élastométrie 13,0 (9,8) kPa. Parmi eux, 24 (Groupe 1) avaient reçu l’AOC en 2ème ligne et les fibrates en 3ème ligne, tandis que 26 (Groupe 2) avaient reçu les fibrates en 2ème ligne et l’AOC en 3ème ligne, toujours en association à l’AUDC. Les durées moyennes de suivi sous bithérapie et sous trithérapie étaient respectivement de 39,7 (29,3) mois et 9,4 (6,6) mois. La trithérapie était associée à un taux de diminution des PAL significatif par rapport à la bithérapie: -27%/an (IC95%: -15%/an – -36%/an; p<0,0001) et cet effet était significatif dans les 2 groupes (Figure). Comparée à la bithérapie, la trithérapie était associée à un rapport de chances pour la normalisation des PAL de 5,5 (IC95%: 1,8 – 17,1; p=0,003) ainsi qu’à une diminution significative de la GGT (p<0,0001), des ALAT (p<0,001), des ASAT (p<0,01) et de la bilirubine totale (p=0,02). La trithérapie était associée à une diminution du score de prurit dans le Groupe 1 (p=0,02) mais pas dans le groupe 2. A la dernière visite, aucun patient n’avait arrêté la trithérapie. Conclusion : La trithérapie associant fibrates, AOC et AUDC améliore les tests hépatiques et augmente les chances de normalisation des PAL chez les patients atteints de CBP ayant une réponse incomplète à un traitement de 2ème ligne.

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Hepatologie

Une hémorragie digestive par hypertension portale peu banale.

2020

Clara ALTMAN, Julia ROUX, Chamnan CHOU, Anne-Laure DESGABRIEL, Armand GARIOUD.
Service d’Hépato-gastroentérologie, CHI de Villeneuve-St-Georges, GHT « Confluences ».

Hépatologie –  2020-07-08 – CC –

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M. Dominique M., 61 ans, est référé le 5 février 2020 aux Urgences pour méléna survenu sous Kardégic dans un contexte de probable cirrhose d’origine éthylique diagnostiquée en 2016. A l’époque, la cirrhose était cotée Child-Pugh A avec des varices oesophagiennes grade 3 traitées en prophylaxie primaire de la rupture par propranolol. La consommation chronique d’alcool est sevrée depuis 2019 et dans ses autres antécédents, on notait un infarctus du myocarde triple-ponté en 2013, un adénocarcinome colorectal en rémission traité par chirurgie et chimiothérapie en 2015 et des troubles neurologiques à type de syndrome cérébelleux associées à des mouvements choréiques en cours d’exploration.
A l’arrivée, le patient était normotendu mais agité sans autre anomalie à l’examen clinique. Un scanner cérébral réalisé après administration d’1mg de midazolam n’a pas trouvé d’anomalie particulière. Sur la biologie à l’entrée, l’Hb était à 11,2 g/dl, les Plaq à 122G/l, le TP à 52%, la bilirubinémie à 43µmol/l et la kaliémie à 6.4 mmol/l sans insuffisance rénale. Pour une meilleure prise en charge, le patient est transféré en réanimation, mis sous insuline-glucose, IPP et sandostatine à la seringue électrique et transfusé de 2 culots globulaires. Rapidement, devant cette agitation avec apparition de signes confusionnels associés une hyperammoniémie à 211 µmol/l, le patient est alors intubé avant la réalisation d’une première endoscopie digestive haute. Celle-ci n’a objectivé aucune trace de sang et confirmé la présence de varices œsophagiennes grade 3 sans aucun stigmate de saignement récent. Une coloscopie avec préparation par la sonde naso-gastrique est alors prévue pour le lendemain.
Dans la nuit du 5 au 6/2, le patient s’est aggravé avec un méléna profus, un choc hémorragique et une déglobulisation à 8,4 g/dl. Il est alors mis sous noradrénaline jusqu’à 15 mg/h, glypressine, exacyl et transfusé de 7 culots globulaires sur la journée du 06/02 avec un mauvais rendement (Hb maintenue autour de 10.5 g/dl). Une exploration endoscopique digestive est alors faite. L’endoscopie haute a retrouvé les varices œsophagiennes grade 3 sans toujours aucun stigmate de saignement et la coloscopie objectivé le méléna avec présence de sang digéré sur l’ensemble du cadre colique et jusque dans l’iléon terminal. Aucune lésion causale n’a pu être mise en évidence et aucun geste spécifique n’a donc été pratiqué. Un angioscanner abdominal a alors été réalisé dans la foulée. Ce dernier n’a pas mis en évidence de fuite de produit de contraste au niveau digestif.
Le patient étant resté instable, il est alors transféré en urgence le 6/2 en réanimation chirurgicale à Saint Antoine où en état de choc réfractaire malgré la transfusion de 3 culots globulaires supplémentaires, il a eu un nouvel angioscanner qui cette fois-ci a objectivé la présence d’un cavernome péri-iléal saignant activement dans le tube digestif.
Le patient a alors été transféré à la Pitié-Salpêtrière le 6/2 au soir pour réalisation en urgence d’un TIPS de sauvetage posé dans la branche postérieure droite de la veine porte. Celui-ci a permis l’arrêt du saignement puis une restauration progressive de l’état hémodynamique.
Les suites ont été marquées par l’absence de récidive hémorragique avec stabilité de l’hémoglobine et par un sepsis pulmonaire documenté à P.Aeruginosa résistant aux carbapénèmes traité par Ceftozolane/Tazobactam. Le patient a été extubé le 16/2 avant un retour en réanimation à Villeneuve le 25/02 puis dans notre service le 27/02. L’évolution a ensuite été lentement favorable avec une reprise progressive de l’alimentation et de la marche avant un retour au domicile le 13/3.
Cette hémorragie par hypertension portale est rare. Elle doit être évoquée notamment devant l’absence de tout stigmate de rupture de varice œsophagienne en cas de méléna survenant chez un patient cirrhotique. Une revue de la littérature sera présentée lors du Congrès.

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Hepatologie

Une perturbation du bilan hépatique chez une diabétique : un diagnostic rare à évoquer.

2020

A.BARON ; C.LEVI ; B.LAMBARE
Service d’Hépato-gastro-entérologie, Centre Hospitalier Sud Francilien, Corbeil Essonnes.

Hépatologie –  2020-07-16 – CC –

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Une patiente de 55 ans, est adressée en consultation pour une perturbation du bilan hépatique évoluant depuis 2 ans avec biologiquement : ASAT 55 UI/L (N<45) ALAT 65 UI/L (N<45UI/L) PAL 325 UI/L (N < 150) GGT 400 UI/L (N < 50 UI/L) et bilirubinémie normale. Elle est asymptomatique. Elle a un diabète de type 2 sévère compliqué d’une néphropathie diabétique pour laquelle est hémodialysée, une hypertension artérielle, une hypercholestérolémie, une surcharge pondérale modérée (BMI à 26). Le bilan de première intention révèle : un foie stéatosique à l’échographie hépatique sans dysmorphie, sans lésion focale, les voies biliaires sont fines, la vésicule biliaire alithiasique. Les sérologies virales C, VIH et VHE sont négatives, elle est vaccinée contre le VHB. Le bilan immun est négatif, notamment les anticorps anti-mitochondries de type 2. L’hypercholestérolémie est contrôlée sous traitement par statine depuis 5 ans, l’hémoglobine glyquée est à 9.5% sous insulinothérapie. Les bilans martial, du cuivre et l’alfa-1 anti-trypsine sont normaux. La cholangio IRM est de qualité moyenne mais ne révèle pas d’obstacle des voies biliaires ou de cholangite évidente, l’IRM hépatique est normale, le pancréas sans lésion évidente. L’élastométrie hépatique par FibroScan est normale à 5.6 KPa. L’échographie cardiaque transthoracique est normale sans signe de dysfonction cardiaque droite. Une ponction biopsie hépatique est réalisée chez cette patiente candidate à une transplantation rénale et révèle une atteinte hépatique liée au diabète peu commune. Les résultats de la biopsie et la discussion diagnostique seront abordés lors du congrès.

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Hepatologie

Mortalité à 5 ans de la cirrhose alcoolique : les malades meurent tout autant, mais pas de la même manière …

2020

Edeline Kaze, Jean Henrion

Centres hospitaliers de Jolimont, Haine-Saint-Paul, Belgique

Hépatologie –  2020-06-24 – CO –

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But : Le pronostic à 5 ans de la cirrhose alcoolique est sombre avec une mortalité pouvant excéder 50%. Le but de cette étude a été de déterminer si ce pronostic avait changé au cours des 2 dernières décades.

Malades et Méthodes : De janvier 1995 à décembre 2014, 932 malades cirrhotiques ont été consécutivement inclus dans un registre de cirrhoses. Parmi eux, 565 avaient une cirrhose d’origine alcoolique (61%). De ceux-ci, 16 ont été exclus car complètement perdus pour le suivi et 114 ont été exclus vu un délai de plus de 2 ans entre le diagnostic de cirrhose et l’inclusion dans le registre. Les 435 malades restants ont été répartis en 2 cohortes, 206 malades inclus dans le registre de 1995 à 2004 (cohorte 1) et 229 malades inclus de 2005 à 2014 (cohorte 2). La mortalité précoce, à 5 ans, a été étudiée au sein de ces 2 cohortes séparées de 10 ans. Le dernier bilan fut réalisé en début 2020 ce qui implique que tous les malades ont eu un suivi d’au moins 5 ans.

Résultats : Parmi les 206 malades de la cohorte 1, 80 malades (groupe 1) sont décédés endéans les 5 ans suivant le diagnostic de cirrhose (39%) alors que parmi les 229 malades de la cohorte 2, 83 malades (groupe 2) sont décédés endéans les 5 ans (36%) (p=0.6) .Pour les 80 malades du groupe 1, l’âge moyen au moment du décès était de 57,2 ans comparé à 61,3 ans pour les 83 malades du groupe 2 (p= 0.02). La gravité de la cirrhose à l’inclusion dans le registre, était identique entre les 2 groupes (groupe 1 : Child Pugh 7.9 versus groupe 2 : Child Pugh 7.8). La mortalité à 5 ans d’origine hépatique était semblable dans les 2 groupes (groupe 1 : 80% versus groupe 2 : 81%). La mortalité hépatique par cirrhose terminale sans évènement précipitant n’était pas significativement différente entre les 2 groupes (groupe 1 : 36% versus groupe 2 : 29% – p=0.4). Par contre, en cas de décès hépatique précipité par un évènement aigu, celui-ci différait en ce qui concerne l’hémorragie digestive (groupe 1 : 30% versus groupe 2 : 9% – p=0.003) et le sepsis (groupe1 : 1,5% versus groupe 2 : 14% – p=0.009). Les décès hépatiques précipités par hépatite alcoolique aigüe sévère (groupe 1 : 17% versus groupe 2 : 18% – p =0.8) et cancer hépatocellulaire (groupe 1 : 9% versus groupe 2 : 15% – p=0.3) ne différaient pas entre les 2 groupes.

Conclusions et points à discuter : 1/ Le chiffre de la mortalité à 5 ans de la cirrhose alcoolique n’a pas changé récemment. 2/ L’âge moyen des cirrhotiques alcooliques au moment du diagnostic de cirrhose et au moment du décès tend à s’élever. 3/ La mortalité précipitée par hémorragie digestive a fortement diminué alors que la mortalité par sepsis augmente. 4/ la mortalité par hépatite alcoolique aigüe sévère ne s’améliore pas.