Une cause inhabituelle de décompensation ictéro-ascitique.

2015

Marie Trompette (1), Dorian Dikov (2), Mathieu Yver (2), Gilles Macaigne (1).
1- Service d’hépato-gastro-entérologie. 2- Service d’anatomo-pathologie. Centre Hospitalier de Marne la Vallée

–  2015-04-16 – CC –

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Un homme de 69 ans est hospitalisé dans le service d’hépato-gastro-entérologie via les urgences en mars 2014 pour une première décompensation ictéro-ascitique. Le patient est retraité, ancien mécanicien-automobile ; il ne fume pas ; il consomme 20 grammes d’alcool par jour. Il a comme seul antécédent une maladie de Parkinson traitée. Cette décompensation ictéro-ascitique évolue depuis quelques semaines, sans autre signe d’appel digestif ni extra-digestif. A l’examen clinique on trouve une ascite tendue, un ictère cutanéo-muqueux franc. Il n’y a pas de signe d’encéphalopathie hépatique et l’examen cardio-pulmonaire est normal. Les principaux résultats du bilan biologique initial sont les suivants : bilirubinémie totale à 183 micromol/l dont 163 de conjuguée ; ASAT à 2.5N ; ALAT normales ; PAL à 5N ; GGT à 13N ; TP à 55% ; albuminémie à 24g/l ; protidémie à 49g/l ; créatininémie 103 micromol/l ; NFS normale avec plaquettes à 356 000/mm3. Ponction du liquide d’ascite : protides < 10g/l ; 220 éléments nucléés dont 1% de PNN ; cytologie négative. L’oesogastroduodénoscopie montre des varices oesophagiennes de grade III. L’échographie et le scanner abdominal révèlent une hépatomégalie homogène avec une ascite de grande abondance, sans dilatation des veines sus-hépatiques et sans thrombose vasculaire. L’échographie cardiaque est normale.

Quelles sont vos hypothèses diagnostiques face à cette décompensation ictéro-ascitique ?

Quels examens complémentaires demandez-vous ?

L’évolution est rapidement défavorable avec une dégradation rapide de l’état général et de la fonction rénale, cause du décès.

Quel est votre diagnostic final ?

Catégories
Gastroenterologie

Les entérites à Campylobacter : une maladie émergente ?

2015

Garrec Hélène(1), Macaigne Gilles(2), Courillon-Mallet Anne(3), Mahjoub Rahma(4)
Tsouria Ahmed(5) , Bonnet Joëlle(6), Zanditenas David(6), Ould-Ahmed Béchir(6), Blazquez Martine(6), Condat Bertrand(6)
(1)Laboratoire de l’hôpital Saint-Camille de Bry-sur-Marne, Services d’hépato-gastroentérologie de (2)Jossigny, (3)Villeneuve Saint-Georges et (6)Bry-sur-Marne, (4)laboratoire de microbiologie du Centre Hospitalier Intercommunal de Villeneuve Saint-Georges. (5)Laboratoire de l’hôpital de Jossigny.

Gastroentérologie –  2015-05-13 – CO –

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De nombreux auteurs proposent un traitement par quinolones en attendant le résultat des coprocultures en cas de syndrome dysentérique aigu évocateur de colite bactérienne, dans le but de couvrir les infections à salmonelle. Cependant, dans de nombreux pays occidentaux l’incidence des entérites à Campylobacter et le taux de résistance des Campylobacter aux quinolones sont en fortes hausses. En France, il n’y a pas eu d’étude rapportée sur l’incidence des entérites à Campylobacter mais le nombre de syndrome de Guillain Barré post Campylobacter est en constante progression depuis 15 ans. Les entérites à Campylobacter sont ainsi devenu la première cause de forme grave de syndrome de Guillain Barré. Le but de notre étude est de vérifier, sur une population de patients vus à l’hôpital, donc atteints des formes potentiellement les plus sévères, si les entérites à Campylobacter deviennent fréquentes et si il faut modifier les recommandations d’antibiothérapie de première intention devant un syndrome dysentérique aigu évocateur de colite bactérienne.
A partir des logiciels des laboratoires de bactériologie de 3 hôpitaux de la région parisienne, nous avons extrait les résultats de toutes les coprocultures de 2010 à 2014. En cas de coproculture positive nous avons extrait, à partir du même logiciel, les informations suivantes : âge, sexe et service d’hébergement du patient, date de la coproculture, présence de leucocytes à l’examen direct, type de germe mis en évidence et antibiogramme.
En 2014, sur les 3 hôpitaux (population adulte et pédiatrique), les coprocultures ont poussé à Campylobacter dans 174 cas (63% des germes mis en évidence). Il s’agissait de Campylobacter jejuni dans 76% des cas et de Campylobacter coli dans 10% des cas. Les coprocultures ont poussé à Salmonelles dans 74 cas (27% des germes mis en évidence). Les Shigelles et les autres germes (E. Coli, Klebsiella oxytoca …) étaient beaucoup plus rares, représentant, au total, moins de 10% des coprocultures positives. Nous disposons à ce jour des résultats détaillés pour les patients adultes (plus de 15 ans) vus à l’hôpital Saint-Camille de Bry-sur-Marne depuis 2010 (les résultats pour les 3 centres seront présentés au congrès) : entre 2010 et 2014, le nombre de Salmonelles et de Campylobacter est passé de 12 à 5 et de 13 à 32, respectivement (cf Tableau). Pour les Campylobacter : (1) les taux de résistance aux quinolones en 2010 et 2014 était de 69 et 63% et celui de résistance aux macrolides de 0 et 6%, respectivement ; (2) deux tiers ont été isolés pendant les 6 mois les plus chauds de l’année (mai à octobre) ; (3) la moitié ont été isolés chez des patients de moins de 30 ans et les trois-quarts avant 40 ans (4) il y avait une prédominance masculine (sex-ratio : 1.5/1).
Conclusion : l’infection à Campylobacter, qui atteint souvent des hommes jeunes pendant les mois chauds, est devenu, de très loin, la plus fréquemment impliquée en cas d’entérite bactérienne vue à l’hôpital et le taux de résistance du Campylobacter aux quinolones est très élevé. Ceci implique (1) de modifier le traitement de première intention devant un syndrome dysentérique aigu évocateur de colite bactérienne, en prescrivant des macrolides, notamment l’azythromycine, traitement de référence du Campylobacter, plutôt que des quinolones et/ou (2) de faire appel au test peu coûteux et fiable de la recherche rapide (résultat en 10 minutes) de Campylobacter sur les selles et (3) de lancer des campagnes d’hygiène alimentaire spécifiques au Campylobacter (bien nettoyer le plan de travail …). Ces mesures devraient permettre de diminuer la durée et l’intensité des symptômes en cas d’entérite bactérienne et, en théorie, de faire régresser le nombre de Guillain-Barré sévère en France.

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Endoscopie

Une méningite bien maligne.

2015

Sophie Pellegrin, Nathalie Meary, Florence Skinazi, Helene Labadie
Service de gastroentérologie, Hôpital Delafontaine, 93200 Saint Denis

Endoscopie –  2015-02-12 – CC –

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Un homme de 76 ans est hospitalisé en urgence pour une fièvre à 39°5, un ralentissement psychomoteur et une altération de l’état général. Il s’agit d’un patient martiniquais, alternant régulièrement sa vie entre la métropole et les Antilles. Une maladie de Horton a été diagnostiquée quatre mois auparavant nécessitant un traitement par Cortancyl 30 mg/j. Le patient est par ailleurs traité pour une antihypertension artérielle par Amlor, Kardegic, Fortzaar, Bisoprolol et Tahor.On note un antécédent de déparasitage avant le début de la corticothérapie.
A l’arrivée aux urgences, le Glasgow est à 14, la TA à 140/94. Il n’y a pas de signe de localisation neurologique, des douleurs abdominales anciennes avec des selles souvent molles. Une ponction lombaire ramène une liquide eau de roche avec 2217 éléments, une protéinorachie à 1,74 g/l, une glycorachie à 4,55, une formule panachée avec 43% de lymphocytes, 46% de neutrophile, un coccigram+ alphahémolytique au direct. La culture pousse à Enteroccus faecium. La recherche d’une porte d’entrée fait pratiquer une gastroscopie qui est normale et une coloscopie qui montre une colite érosive aphtoide étendue du colon gauche au caecum.Les biopsies du colon retrouvent une colite aiguë en poussée avec de nombreux polynucléaires éosinophiles, des microfoyers granulomateux constitués de cellules épithélioïdes et d’éosinophiles sans inclusion virale. Un examen parasitologique des selles retrouve des larves d’anguillules nombreuses.La recherche d’anguillule dans le LCR est négative. Les biopsies pratiquées au cours de la coloscopie ont été compliquées de rectorragies avec déglobulisation à 7g et la coloscopie de contrôle n’a pas montré de lésion responsable du saignement. Un déparasitage par Ivermectine a été pratiqué. L’évolution clinique a été favorable.
Le diagnostic retenu est celui d’anguillulose maligne compliquant une corticothérapie, révélée par une méningite à enterococcus faecium.Le contexte clinique, l’aspect endoscopique doit faire rechercher une origine parasitaire et le diagnostic différentiel est à faire avec une MICI. Le caractère hémorragique des biopsies est souvent décrit au cours des anguilluloses coliques.
Dans cette hypothèse, il peut être important de savoir sensibiliser les anatomopathologistes à la recherche des granulomes souvent centrés sur les oeufs d’anguillule.